A l'heure où les prix agricoles s'envolent sur les marchés boursiers, SOLIDARITÉ réaffirme son engagement envers la souveraineté alimentaire, en promouvant les ressources locales.
C'est le message que SOLIDARITÉ a porté durant le FSM de Dakar au mois de février 2011, en s'appuyant sur la création d'un espace d'artisanat alimentaire.
C’est la richesse et les suites de cette expérience que nous voulons partager avec vous sur ce blog, en attendant la mise en œuvre de projets de long terme en partenariat avec les organisations paysannes d’Afrique de l’Ouest...
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1 avril 2014

Pour quand le grand retour du sorgho ? (3/3)

Nous continuons avec la troisième et dernière partie de notre article sur le sorgho. Bonne lecture !

En Afrique de l'Ouest, la culture du sorgho est orientée majoritairement vers l'alimentation humaine. Au Mali, le mil et le sorgho représentaient en 2007 à eux seuls 30 % de la consommation calorique journalière du pays. Quant au Burkina Faso, 53,6 % des ménages agricoles cultivent le sorgho rouge et 71,4 % cultivent le sorgho blanc en saison des pluies. La consommation par habitant est de 90-100 kg/an.   


Les grains de sorgho sont décortiqués, séchés au soleil, vannés et réduits en farine. Cette dernière permet de préparer des bouillies, du couscous, des galettes et, notamment au Burkina Faso, de la pâte spéciale appelée le tô, mangée avec différentes sauces (sauce oseille, sauce graines, etc.).
Si vous avez déjà visité le Burkina Faso, vous avez certainement eu l'occasion de goûter également le dolo. Il s'agit de la bière locale préparée à base de sorgho rouge fermenté. 


Alors pourquoi le sorgho résiste-t-il en Afrique de l'Ouest malgré les taux de popularité croissants des aliments à base de blé et de maïs ? Vu qu'il est cultivé notamment par des petits agriculteurs avec des ressources en eau limitées et sans application d'engrais ou d'autres intrants, sa capacité d'adaptation aux conditions climatiques difficiles est primordiale. Même si le rendement du maïs dans la région est nettement plus élevé dans les conditions optimales (1,66 t par hectare pour maïs contre 0,89 t pour sorgho au Burkina Faso en 2011), la culture de sorgho demande beaucoup moins d'eau et détient ainsi un vrai avantage en cas de sécheresse. Comme le mil, le sorgho est connu pour pousser dans des environnements difficiles où d'autres cultures se développent faiblement. Les deux céréales supportent les grandes chaleurs, ce qui est précieux pour les paysans dans les zones arides. 


Étant une plante pérenne qui boucle son cycle en moins de trois mois, le sorgho peut être récolté plusieurs fois par an, ce qui constitue un autre grand avantage. Enfin, le sorgho possède un pouvoir notable : il a la capacité d’absorber l'azote minéral du sol pour ses propres besoins. Cet aspect est bénéfique pour les paysans qui n'ont pas forcement accès aux engrais organiques. Par ailleurs, cette caractéristique présente l'avantage de détoxifier les sols gavés d'azote, technique pouvant être utilisée dans les régions ou l'on applique des quantités importantes d'engrais chimiques.

Au Burkina Faso, les paysans ne cessent d'améliorer les semences ainsi que les techniques de culture. Comme nous explique Jean-Paul Coleart, « ils ont sélectionné la race Guinea, aux grandes pannicules lâches qui présentent l'avantage de sécher facilement, donc avec moins de risques de moisir lors de la saison des pluies ». Souvent, ils associent la culture du sorgho à celle du nièbe (Vigna unguiculata), haricot africain de taille moyenne. Cette association permet de réduire le ruissellement et l'érosion des sols, d'améliorer la fertilité du sol en matière organique et azote et de lutter contre les maladies de culture. Le ministère burkinabé de l'agriculture reconnaît qu'un vrai savoir-faire paysan a été développé et qu'il ne devrait pas être perdu au profit des autres céréales. 

Si vous suivez régulièrement notre blog, vous avez sûrement remarqué notre série d'articles dédiée au zaï, technique agricole traditionnelle originaire de l'Afrique de l'Ouest. Les différentes expérimentations ont montré que cette méthode, notamment avec les grands poquets et associée à l’amendement du compost, peut presque doubler le rendement du sorgho sur les terres dégradées en régions sahéliennes !

Le sorgho n'a donc pas encore dit son dernier mot. Les savoir-faire anciens couplés avec les nouvelles variétés améliorées pourraient en faire une des céréales de l'avenir. Il s'agit d'une céréale passionnante et je vous recommande chaudement de voir le film de cinéaste chinois Zhang Yimou « Le sorgho rouge » qui vous permettra de découvrir la fabrication artisanale du vin de sorgho en Chine rurale.


Sources : 
Jean-Paul Collaert (2013) : Céréales : La plus grande saga que le monde ait vécu
Claire König (2012) : Céréale : millet et sorgho, le mil
Association Solibam : Zaï amélioré avec compost
Ministère des affaires étrangères (2002) : Mémento de l'agronome
FAO (1998) : Le sorgho et les mils dans la nutrition humaine
MAFAP SPAA (2013) : Analyse des incitations et penalisations pour le mil et le sorgho au mali
CMA/AOC (2005) : Filière mil/sorgho dans la zone CMA/AOC, Note technique
Ministère de l’agriculture et de la sécurité alimentaire (2013) : Situation de référence des principales filières agricoles au Burkina Faso
Fao et Institut international de recherche sur les cultures des zones tropicales semi-arides (1997) : L'économie Mondiale du Sorgho et du Mil: Faits, Tendances et Perspectives

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